The Murderer

Corée du Sud 2010
Sélection « un certain regard » Cannes 2011

De Na Hong-jin 
Avec Ha Jung-woo, Kim Yun-seok





Après The Chaser, son premier film, Na Hong-jin, confirme qu’il est cinéaste sur qui il faudra désormais compter.
Intitulé « The yellow sea » dans sa version originale, ce qui signifie la mer jaune, le film de Na Hong-jin, prend pour cadre, Yanji, ville chinoise de la Préfecture de Yanbian, entravée entre la Corée du Nord et la Russie, où vivent quelques 800 000 Sino-coréens surnommés les «Joseon-Jok.». Baignée par l’océan pacifique et encerclée par les côtes de la Chine, du Japon et de la Corée du Sud, Yanji fait surtout figure de zone frontière, un no man’s land de misère, où presque la moitié de sa population survit dans un quotidien fait d’activités illégales et d’errance fantomatique.



C’est ici que Gu-nam (Ha Jung-woo) traîne son désespoir. Chauffeur de taxi endetté, il est sans nouvelle de son épouse, partie depuis 6 mois en Corée du Sud pour trouver du travail.

Poussé par la détresse, il accepte l’aide d’un parrain local, qui lui propose de passer en Corée, afin d’y retrouver sa femme et d’éponger ses dettes, en contrepartie, Gu-nam devra tuer un homme dont il ne connaît rien. Proche de la misère, Gu-nam accepte le contrat, espérant pouvoir retrouver celle qu’il aime et subvenir aux besoins de sa famille. Mais pour l’apprenti assassin rien ne se passera comme prévu.

La misère est un crime



Au delà du pitch mortellement accrocheur, c’est à la fois un drame humain et un constat social qui se joue sous nos yeux et que subit une bonne partie des laissés pour compte à travers le monde. Avec ici en zoom allégorique : l’exploitation des immigrés chinois dans les pays dit prospères.



Yanji est un chaos géopolitique et les flux migratoires autours des pays satellites conduisent à une exploitation sordide de la détresse des autochtones. L’énergie du désespoir habite complètement le métrage et Na Hong-jin nourrit son propos avec un rythme trépidant, fait de tensions et de sursauts narratifs se faisant constamment échos. Le meurtre programmé dérape, les retrouvailles espérées tournent au cauchemar et inexorablement tous les enjeux se consument dans une violence urbaine qui semble emporter tous les protagonistes dans un délire tragico-absurde fait de coup de haches, de battes et même d’ossements ! Gu-nam malgré ses nombreux sacrifices verra ainsi sa quête dénaturée par la violence et brisée par l’anathème d’un bonheur impossible.


Que nous reste t il sinon l’amer conclusion que l’enfer est bien sur terre. Que même la plus noble des intentions (l’amour) peut-être détournée par la misère.

The Murderer est un film qui marque et qui nous laisse mélancoliquement songeur.

J'ai rencontré le diable

Corée du Sud 2010
De Kim Jee-woon
Avec Lee Byung_hun, Choi Min-sik, Oh San-ha

« Deux sœurs », « Le bon, la brute et le cinglé », 2 films antinomiques par excellence, pourtant issus du même et brillant esprit. Kim Jee-woon est décidément de ceux que l’on ne parvient pas à rentrer dans une case. Avec sa troisième œuvre, le cinéaste passionné, va frapper fort, bien décidé à marquer nos esprits et nos rétines, quitte à le faire avec une tâche de sang indélébile.


Le film s'ouvre sur une citation de Nietzsche tirée de Par delà le bien et le mal : "Que celui qui lutte avec des monstres veille à ce que cela ne le transforme pas en monstre. Si tu regardes longtemps au fond de l’abîme, l’abîme aussi regarde au fond de toi.”
A partir de là tout est dit. Et avec cynisme, complaisance, humour et tragédie Kim Jee-woon laissera s’enfoncer ses personnages, illustration parfaite de cette terrible réflexion.

 
Soo-Hyun (Lee Byung-hun) est un agent du gouvernement dont la fiancée vient d’être assassinée. Partit à la recherche de son meurtrier, il découvre que celui-ci (Choi Min-sik) est un psychopathe totalement asocial. Mais alors que sa traque l’amène très vite dans la tanière du tueur, Soon Hyun le relâche. En réalité Soo-Hyun nourrit un autre dessein, harceler le tueur dans son quotidien et lui faire payer chacun de ses actes. Mais sur ce chemin impossible de la rédemption, Soo-Hyun découvrira à ces dépens (et aux dépend de nombreuses victimes) que la mal véritable n’a pas de conscience et que sa croisade vengeresse pourrait bien lui coûter une partie de son humanité.


Dans cette curieuse vendetta, les connaisseurs apprécieront la confrontation entre deux stars emblématiques du cinéma coréen, Lee Byung-hun (A Bittersweet Life) et Choi Min-Sik (Old Boy) troublant de naturel dans ce rôle d’inhumanité.

J’ai rencontré le diable suffit à rappeler le « jusqu’au boutisme » du cinéma coréen, un cinéma qui a des tripes (sans mauvais jeux de mots). D’ailleurs j’attends avec impatience la relève avec The Murderer de Na Hong-jin dont je vous parlerai un peu plus bas.

Canular ou film de vengeance ultime ?


Mais au delà l’efficacité glaciale de ce film, cette déshumanisation sanglante me pose laisse quelque peu circonspect… et il me faudra beaucoup de recul pour saisir les intentions profondes de l’auteur. Que ce soit à travers ses envolées très second degré et sa galerie de seconds rôles décadents (le cannibale), ou bien sa relation exagérément misogyne avec les femmes. S’agit-il d’une mise en abime du genre ? Quoiqu’il en soit j’aurai préféré un peu moins de violence, de manière à frustrer les plus pervers.
Alors excès de complaisance ? De cynisme ? Heureusement la détresse dans le regard de Soon-Hyun lorsqu’il comprend son impuissance et l’inutilité de sa démarche, me rappelle dans la douleur et les larmes que «J’ai rencontré le diable» est un film profondément humain.


Sans doute venons-nous d’assister à l’enterrement ultime et brutal du film de vengeance.

Fist of Dragon

2010 Malaisie
De Michael Chuah
Avec Michael Chuah, Fiona Xie,
Henry Thia,


A la demande de son Père, le jeune Li (Micheal Chuah) se rend chez son Oncle (Henri Thia) confronté à des difficultés financières. Peu habitué à la culture de cette ville moderne dont la population lui apparaît comme agressive et égoïste, Li envisage de rentrer chez lui, lorsqu’il découvre que les ennuis de son oncle sont surtout dus à la pègre locale et ses gangs qui terrorisent les commerçants de quartier. Li décide de rester et de faire face en espérant créer des émules parmi la population. Entre colère ou résignation les habitants devront choisir, mais l’affaire se corse lorsque Li apprend que la fille de son oncle (Fiona Xie) fait partie d’un de ces gangs. La ville plonge alors dans la tourmente.
Celui là aussi je l’attends avec ferveur. Kung fu moderne et urbain, drôle et rageur. Fist of Dragon est un melting pot de talents en provenance de toute l’Asie du Sud Est. Un véritable western contemporain mettant en scène la rébellion des habitants d’un quartier et surtout un clin d’œil au mythique Bruce Lee qui jadis donnait le change aux mafieux dans la Fureur du dragon. Un des films coup de poing de l’année.




Ce texte provient de whispering-asia, la copie intégrale est illicite!

Shaolin 2011

2010 Chine
De Benny Chan
Avec Andy Lau, Nicolas Tse,
Jackie Chan, Bingbing Fan

Pendant la période tourmentée des guerres intestines de la Chine des années 20, le général Hou Jie (Andy Lau) est un seigneur de guerre impitoyable et son cruel lieutenant Man Cao (Nicolas Tse) est un élève assidu dans l’art de la fourberie. Si bien qu’au final celui-ci provoquera la déchéance du maître. Aculé, seul et ébranlé, Hou Jie fuit et trouve refuge dans le temple de Shaolin qu’il avait par le passé souillé et saccagé.

Une des attentes de cette année 2011, produit par Andy Lau et réalisé par Benny Chan. Shaolin a tout de l’œuvre rêvée. Au programme : Andy Lau tyrannique et repentit, Nicolas Tse détestable à souhait (donc excellent interprète) , Jackie Chan en mentor cuistot, des artistes martiaux d’exceptions et surtout un message de compassion propre au kung fu du Temple de la Petite Forêt .


Un film solidement interprété et porté par des acteurs sincères, dont l’humanité et la chaleur de notre Jackie réchauffe les couleurs froides d’une très belle photographie.


Un film que l’on ne se lasse pas de revoir.


Ce texte provient de whispering-asia, la copie intégrale est illicite!