J'ai rencontré le diable

Corée du Sud 2010
De Kim Jee-woon
Avec Lee Byung_hun, Choi Min-sik, Oh San-ha

« Deux sœurs », « Le bon, la brute et le cinglé », 2 films antinomiques par excellence, pourtant issus du même et brillant esprit. Kim Jee-woon est décidément de ceux que l’on ne parvient pas à rentrer dans une case. Avec sa troisième œuvre, le cinéaste passionné, va frapper fort, bien décidé à marquer nos esprits et nos rétines, quitte à le faire avec une tâche de sang indélébile.


Le film s'ouvre sur une citation de Nietzsche tirée de Par delà le bien et le mal : "Que celui qui lutte avec des monstres veille à ce que cela ne le transforme pas en monstre. Si tu regardes longtemps au fond de l’abîme, l’abîme aussi regarde au fond de toi.”
A partir de là tout est dit. Et avec cynisme, complaisance, humour et tragédie Kim Jee-woon laissera s’enfoncer ses personnages, illustration parfaite de cette terrible réflexion.

 
Soo-Hyun (Lee Byung-hun) est un agent du gouvernement dont la fiancée vient d’être assassinée. Partit à la recherche de son meurtrier, il découvre que celui-ci (Choi Min-sik) est un psychopathe totalement asocial. Mais alors que sa traque l’amène très vite dans la tanière du tueur, Soon Hyun le relâche. En réalité Soo-Hyun nourrit un autre dessein, harceler le tueur dans son quotidien et lui faire payer chacun de ses actes. Mais sur ce chemin impossible de la rédemption, Soo-Hyun découvrira à ces dépens (et aux dépend de nombreuses victimes) que la mal véritable n’a pas de conscience et que sa croisade vengeresse pourrait bien lui coûter une partie de son humanité.


Dans cette curieuse vendetta, les connaisseurs apprécieront la confrontation entre deux stars emblématiques du cinéma coréen, Lee Byung-hun (A Bittersweet Life) et Choi Min-Sik (Old Boy) troublant de naturel dans ce rôle d’inhumanité.

J’ai rencontré le diable suffit à rappeler le « jusqu’au boutisme » du cinéma coréen, un cinéma qui a des tripes (sans mauvais jeux de mots). D’ailleurs j’attends avec impatience la relève avec The Murderer de Na Hong-jin dont je vous parlerai un peu plus bas.

Canular ou film de vengeance ultime ?


Mais au delà l’efficacité glaciale de ce film, cette déshumanisation sanglante me pose laisse quelque peu circonspect… et il me faudra beaucoup de recul pour saisir les intentions profondes de l’auteur. Que ce soit à travers ses envolées très second degré et sa galerie de seconds rôles décadents (le cannibale), ou bien sa relation exagérément misogyne avec les femmes. S’agit-il d’une mise en abime du genre ? Quoiqu’il en soit j’aurai préféré un peu moins de violence, de manière à frustrer les plus pervers.
Alors excès de complaisance ? De cynisme ? Heureusement la détresse dans le regard de Soon-Hyun lorsqu’il comprend son impuissance et l’inutilité de sa démarche, me rappelle dans la douleur et les larmes que «J’ai rencontré le diable» est un film profondément humain.


Sans doute venons-nous d’assister à l’enterrement ultime et brutal du film de vengeance.

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